C’est l’histoire d’un coup de gueule, et même de plusieurs. Tout d’abord, il y a celui (bien légitime) du détournement d’image avec le photographe français Roberto Neumiller, dont l’un des plus célèbres clichés a été utilisé sans aucun respect du droit de la propriété intellectuelle et artistique.
Et comme si cela ne suffisait pas d’oublier de lui demander son accord (et donc de lui payer d’éventuels droits d’auteur), la signification même de cette photo très symbolique a été largement détournée pour ne pas dire carrément déformée à des fins politiques, et pour transmettre un message peu recommandable. Le second coup de gueule est donc celui (ceux !) de tous les photographes qui évidemment se font le relais de leur confrère pour dénoncer ce qui n’est ni plus ni moins, que du vol. Bref, on en parle sur le net.
Le détournement d’image
Il me semble que nous l’avons tous vu un jour ou l’autre cette image d’un camion roulant en plein désert incroyablement chargé d’hommes et de ballots de toutes tailles. Une photo qui fascine il est vrai, et que Roberto Neumiller a prise en 2006, pendant l’un des nombreux voyages liés à sa collaboration avec l’association SOS Sahel, elle-même fondée en 1976 suite aux grandes sécheresses qui avaient décimé la population de ces régions. Le public avait d’ailleurs pu découvrir une sélection de ces images, souvent magnifiques, sur les grilles du Jardin du Luxembourg à Paris, où elles furent exposées en 2007. L’histoire d’un retour au pays. Soyons clairs : cette image a été utilisée en détournement d’image par des sites et autres blogs politiques d’obédience « à droite de la droite ». On comprend pourquoi et il n’est pas nécessaire de faire un dessin. Alors sans émettre le moindre jugement (nous ne sommes pas là pour ça), le détournement est avéré lorsque l’on sait ce que représente vraiment cette image, et ça c’est son auteur qui nous l’explique en quelques lignes : « Après une période de travail en Libye et après avoir été payés en argent local non-échangeable en francs CFA, ces travailleurs migrants achètent avec leurs économies des tas de marchandises (des vélos, des machines à coudre, des télés, etc.) avant de rentrer chez eux au terme d’un voyage éprouvant de 2500 km à travers le désert. Ils les vendront ensuite au pays… Ce sont donc de « riches » marchands et pas de pauvres demandeurs d’asile !»
Que conclure de tout cela ?
Le Droit d’Auteur est un droit inaliénable, et ce, pour tous les artistes qu’ils soient musiciens, photographes, auteurs de textes, peintres et célèbres ou non. Ce n’est pas parce qu’une image fait le tour du monde qu’elle appartient à tout le monde, et que ce « tout le monde » peut s’en servir d’illustration pour n’importe quoi ! Il y a une loi pour ça. Une loi malheureusement soumise à de fortes dérives avec le web. La plus grande vigilance est donc de rigueur et la règle simple : il faut PROTÉGER images et textes contre les possibilités infinies du « copié collé » que représente le détournement d’image. Car partage ne rime pas avec pillage.